lundi 7 décembre 2009

"Arrêtons ces histoires d’identité nationale et essayons plutôt de comprendre pourquoi certains Français ou étrangers se sentent rejetés."

Identité nationale : ma carte d’identité indique française. C’était une évidence et je ne me posais pas la question de savoir ce que voulait dire être française.

J’ai eu parfois à l’étranger l’occasion de me rendre compte que j’étais française pour les autres : au Maroc, en 58, où même gentiment on me faisait sentir que j’appartenais à un pays qui avait colonisé. A Bogota où les Colombiens que je fréquentais étaient persuadés qu’en tant que Française, moi petite instit, je discutais avec Sartre à la terrasse du Flore ! Pour eux être Français c’était être très cultivé! A Buenos Aires, je me suis rappelée ma nationalité quand, le président Pompidou étant décédé, les Argentins m’ont présenté leurs condoléances. En Espagne, en 71, il y avait encore une certaine animosité contre les Français, venant des milieux post-franquistes à cause de Napoléon. Et gare aux pneus d’une voiture immatriculée de France le « Dos de Mayo » !
Donc, qu’on n’y pense ou pas, on doit assumer à l’étranger tous les a priori sur les Français, de même que nous généralisons des traits soi-disant allemands, anglais ou maghrébins. Par contre en France, la question d’identité ne se pose pas quand on a l’air «français de souche ». Mon cousin qui a un type méditerranéen (corse) plus marqué que moi a eu dans les années 60, pendant la guerre d’Algérie, des problèmes avec la police qui le prenait pour un Algérien et donc pour un fellagha. Dans ce cas là, c’était le faciès qui vous faisait français ou pas, comme aujourd’hui.
On a pourtant fait des progrès, car en 1880 à Agde, la populace a lynché à mort 80 ouvriers agricoles italiens sous l’œil indifférent de la police, au prétexte qu’ils leur prenaient leur travail, le tout manipulé par des politiciens.
Pour le moment on n’en est pas là, mais attiser les peurs et instrumentaliser les différences est toujours dangereux. Alors arrêtons ces histoires d’identité nationale et essayons plutôt de comprendre pourquoi certains Français ou étrangers se sentent rejetés. Ce débat ne sert qu’à réveiller des peurs qui servent certains politiques.


Mona Muraccioli